Lockett : 28 rebonds dans le passé
L'ancien Lorientais détient le record de rebonds sur un match depuis 20 ans Lockett : 28 rebonds dans le passé
2 mars 2010
Sport
collectif où les performances sont individualisées, le basket aime les stats.
Depuis le 17février 1990, le record en élite de 28 rebonds pris par le pivot
américain du Cep Lorient, Phil Lockett, tient toujours. L'occasion de faire un
grand (re-)bond de vingt ans en arrière.
Je vous
parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître.L'ABCep
Lorient, en ce temps-là, évoluait pour la dernière saison en N1A et Phil
Lockett faisait la loi jusque dans les raquettes. Au point d'être encore
aujourd'hui tout en haut de la fiche de stats avec ses 28 rebonds pris salle
Xavier-Le Louarn face à Roanne, le 17 février 1990 (défaite 82-96). Un record
parfois approché (27prises pour le Parisien Shamsid-Deen et le Dijonnais
Mackey) mais toujours à battre.
«Un record à la Beamon !»
«La perf est belle. C'est un record à la Beamon! », assure Jacques Monclar,
faisant référence au mythique record du monde du saut en longueur (8,90 m) que
l'Américain Bob Beamon détint de 1968 à 1991. Monclar, alors jeune entraîneur
d'Antibes, se souvient parfaitement de ce joueur «qui tenait la raquette à lui
tout seul. Véritable usine à rebonds, il formait une sacrée paire d'Américains
avec Derrick Pope». Pope, l'autre star de cette belle époque lorientaise avec
le meneur Ed O'Brien. Deux grosses personnalités à l'opposé du caractère de ce
natif de l'Alabama. «Discret? Introverti, oui!», rigole Nicolas Paul, alors
coach-assistant du Mexicain Alejandro Arteaga. «J'ai passé une saison avec lui
et je ne me rappelle pas avoir entendu le son de sa voix». «Taoïste, il était
très zen. Il ne disait rien, sauf avec Derrick, mais il voyait tout. En deux
ans, il n'a dû prendre qu'une seule fois la parole. Un jour qu'un gars de
l'équipe se plaignait, il lui a lancé: ?Remets-toi d'abord en question?.
Personne n'a moufté», se souvient son partenaire Olivier Garry, qui le revoit
arriver à l'entraînement avec «son vieux survêt', son petit sac de sport, nous
disant bonjour en hochant la tête. C'était un gars intelligent, atypique. A
l'image de cette équipe.» Atypique, le mot ne semble pas trop fort quand on
écoute l'assistant de la saison 88-89, Sylvain Candelon, à l'origine de sa
venue à Lorient. «Il avait une jambe plus courte que l'autre, une cicatrice sur
le front après un choc contre le panier sur un contre et un virus aux poumons
l'empêchait de s'entraîner beaucoup. Ça lui a gâché sa carrière. Mais en match,
quel joueur! Peut-être le meilleur pivot américain jamais vu en France.» Alors
tout jeune pro à Limoges, Jimmy Vérove acquiesce. «Il était relax, vraiment
cool. Il ne faisait pas peur à l'échauffement mais, à la fin du match, tu
savais qui c'était !»
«Inarrêtable?Fifi? »
Et ce jour des Cendres de 1990, «Fifi», comme l'avaient affectueusement
surnommé ses partenaires, n'a laissé que des miettes à ses adversaires (voir la
feuille de match). «Je me souviens qu'à la mi-temps, Alex (Arteaga, le coach)
avait demandé à voir la feuille de stats d'urgence. Il en était déjà à 17
rebonds ! », poursuit Garry. «Quand il avait décidé de prendre tous les
rebonds, comme ce soir-là, ?Fifi? était inarrêtable.» Mais, quel était donc le
secret de celui qui possède aussi la meilleure moyenne de rebonds sur une
saison (13,7)? «Sa taille (2,08m), bien sûr mais surtout un temps de réaction
impressionnant, un sens du placement et une grosse concentration», explique
Paul. Pour Candelon: «Un timing extraordinaire et une vraie science du rebond à
la Dennis Rodman». Jimmy Vérove confirme la comparaison avec l'ancien triple
champion NBA: «Une bonne lecture des trajectoires. Pas 50 mouvements mais les
deux, trois qu'il avait, il les faisait parfaitement. Et surtout, il prenait
beaucoup de rebonds offensifs». Une particularité qui fait encore sourire son
jeune coéquipier de l'époque, Greg Thaon. «Entre nous, on se demandait s'il ne
faisait pas parfois exprès de rater un shoot pour prendre le rebond
derrière...» Vingt ans après, le mystère demeure.
Lockett. «Le record tient toujours ?»
Depuis son Alabama natal, Phil Lockett, 50 ans aujourd'hui, a appris avec surprise que sa performance n'avait pas été battue.
Phil, si je vous parle d'un record de 28 rebonds avec Lorient, à quoi
pensez-vous?
«Je me souviens que l'on avait perdu ce match contre un concurrent pour le
maintien et que j'avais pris pas mal de rebonds.»
Et bien, ce record tient toujours!
«Non, c'est vrai? Je suis surpris que personne ne l'ait battu depuis. Ce
n'était pas un objectif pour moi. Quand je rentrais sur le terrain, je voulais
seulement gagner le match.»
Pourriez-vous nous dire pourquoi vous étiez si fort au rebond alors que vous
n'étiez pas le plus grand?
«Sans doute car cette balle, je la désirais plus que tout. C'est une question
de volonté. Vous devez la vouloir plus que l'adversaire. J'avais deux objectifs
en match: prendre du plaisir et des rebonds. Ma motivation, mon inspiration, je
les trouvais dans ma foi et
l'étude des arts martiaux.Le joueur des Celtics de Boston, Rajon Rondo
(révélation du début de saison NBA), en est l'exemple parfait. Il n'est pas le
meilleur, ni le plus rapide mais il est déterminé.»
Entre les deux saisons à Lorient, les propositions n'ont pas manqué (le
Paris Racing notamment), pourtant vous êtes revenu au CEP. Pourquoi?
«Je ne jouais pas pour l'argent (on parle de 50.000dollars pour sa première
saison puis 65 à 70.000 pour la seconde). Ma famille et moi avions apprécié
notre accueil lors de la première saison. J'ai beaucoup de bons souvenirs de
votre région. Je n'y suis pas encore revenu, ni en France d'ailleurs, mais ce
serait avec plaisir.»
Que faites-vous aujourd'hui? Toujours dans le basket?
«Après avoir partagé mon temps entre l'Argentine et les Etats-Unis, je suis
installé en Alabama. Je travaille comme cadre chez United States Pipe
(fabricant de pipeline). Et non, je ne suis plus dans le basket. Je regarde
quelques matchs à la télé et je suis, bien sûr, la carrière de mes deux fils.
Je suis fier de les voir prendre le relais.»
Blessé, soigné, marié.
Durant une bonne partie de sa carrière, Lockett a enchaîné deux championnats en une seule saison entre l'Europe et l'Argentine, pays dont il est littéralement tombé amoureux. Enfin, surtout de cette infirmière qui le soigna après une blessure en match. Magali Ruiz deviendra sa femme et le rejoindra à Lorient avec Phil junior, né en 1988 en Israël, où jouait alors son papa.
Irremplacable.
Blessé au genou en mars 90 (Pope lui est retombé dessus!), Lockett n'a pu finir sa seconde saison lorientaise. Pour le remplacer, les dirigeants avaient fait appel à John Shasky, ses 2,13m et ses 136 matchs en NBA. Malgré son CV, Shasky ne sauva pas le CEP de la relégation et ne fit pas oublier «Fifi», qui, lui, ne joua jamais en NBA.
Les autres records.
Enregistrés depuis la création de la LNB en 1987, les records datent tous du virage des années 90, période où les un ou deux joueurs majeurs de chaque équipe prenaient le jeu à leur compte. Seule exception, les points, comptabilisés depuis 1949, avec le record de Jean-Pierre Staelens (Denain) et ses 71 unités en 1967. Passes: 28, Pierre Bressant (Racing Paris, 1989). Interceptions: 12, Derrick Lewis (Reims, 1990). Contres: 10, Derrick Lewis (Reims, 1990). Trois-points: 8 sur 8, Juric Zdovc (Limoges, 1992). Lancers-francs: 19 sur 19, Ron Davis (Mulhouse, 1987)
L'ancien Lorientais détient le record de rebonds sur un
match depuis 20 ans Lockett : 28 rebonds dans le passé.
L'impressionnante ligne de statistiques de Phil Lockett ce soir du 17 février
1990 : 28 rebonds, dont 11 offensifs, 32 points (16 sur 21 à 2 pts), 1 contre,
1 interception pour 4 balles perdues en 40 minutes.
L'ancien Lorientais détient le record de rebonds sur un
match depuis 20 ans Lockett : 28 rebonds dans le passé.
Phil Lockett suit la carrière des ses basketteurs de fils, Nahum (au centre) et
Philipp Junior, pré-sélectionné en équipe d'Argentine des 19 ans.
L'ancien Lorientais détient le record de rebonds sur un
match depuis 20 ans Lockett : 28 rebonds dans le passé.
Phil Lockett (ici face à Caen, le 26 novembre 1989) était impérial sous les
panneaux de Nationale 1 A. Photos archives Le Télégramme
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